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LE VIDEO-BLOG DE JENB PRODUCTIONS
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LE VIDEO-BLOG DE JENB PRODUCTIONS
14 octobre 2011

A deux jours d'un scrutin : Peut-on filmer ou photographier dans un bureau de vote ?

Dossier Élections 2012

 

 

LE DROIT A L'IMAGE DANS UN BUREAU DE VOTE


Retour sur un thème important pour nous blogueurs, de plus en plus équipés d'appareils photo et de caméras : Le droit à l'image. 

Surtout à 2 jours d'un scrutin plus important qu'il n'y parait.

En préambule, j'attire votre attention sur le fait que cet article s'appuie sur notre expérience de terrain, de conseils d'élus ou ex-élus et des références trouvées sur internet, de préférence sur des sites notoirement réputés pour leur sérieux que vous retouverez dans les références en bas de page. Néanmoins, si vous disposez sur ce sujet de liens qui vous semblent pertinents, et en particuliers de jurisprudences récentes, n'hésitez pas à nous le faire savoir dans vos commentaires.

 

Un incident à la base du questionnement

C'est sur la base d'un incident survenu justement à Noisy-le-Sec sur ce sujet dimanche dernier que se base le questionnement. 

En quelques mots, les faits sont les suivants : Dans un bureau de vote noiséen, avant l'ouverture au public dimanche dernier, le Président [1] demande à ses assesseurs s'il peut prendre quelques photos du scrutin. La majorité s'y oppose. Plus tard, dans la journée, deux élus vont de bureaux en bureaux Noiséens, (comme le veut la coutume de nombreux élus, responsables politiques,... un jour de vote) accompagnés d'un photographe auquel il a été opposé un refus à photographier de la part du président dudit bureau sur le fondement de la question posée en début de séance.

Le Code Civil est le fondement sur le plan strict du Droit

C'est sur la base de l'article 9 du Code Civil que se trouvent une partie des réponses juridiques. Du moins l'essentiel. Cet article en effet stipule : « Chacun a droit au respect de sa vie privée. Les juges peuvent, sans préjudice de la réparation du dommage subi, prescrire toutes mesures, telles que séquestre, saisie et autres, propres à empêcher ou faire cesser une atteinte à l'intimité de la vie privée : ces mesures peuvent, s'il y a urgence, être ordonnées en référé. » [2]. C'est donc bien " notre vie privée " qui est le socle législatif des Droits à l'image d'une façon générale.

 

Dans un article très documenté que je vous invite à consulter, Maître Vanessa Fitoussi, Avocate au Barreau de Paris [3],  évoque uniquement des cas de captations audio et/ou vidéo relatifs à des problèmes liées à "  la vie privée " et " à l'intimité " .

La question à poser n'est donc plus de savoir " si l'on peut capter ? " mais de délimiter " la frontière entre vie privée et vie publique ". De plus le problème ne se pose plus en terme de " captation " mais surtout de " diffusion " et d' " utilisation de la chose captée "

Je n'ai pas trouvé de jurisprudence récente sur le problème spécifique des bureaux de votes, mais il existe malgré tout une abondante jurisprudences sur le caractère " public " de certaines activités et sur les problèmes liés à l'enregistrement de conseils municipaux.

Notions de " vie privé " et d' " intimité "

En réalité toutes les jurisprudences s'appuient sur ces deux notions lorsqu'un conflit portant sur le Droit à l'image d'un individu (Je n'évoquerai pas ici le cas les droits connexes que sont les Droits Artistiques qui peuvent être parfois liés, ni le cas particulier des mineurs ou adultes sous protection juridique) leur est soumis. La juridiction correctionnelle saisie de ce types de litiges généralement spécialisée dans les délits de presse et désormais les délits commis par internet va en premier lieu se poser la question suivante : Y-a-t-il eu une atteinte " à la vie " privée ? " et / ou à l ' " intimité " du plaignant ? De même les images sont-elles accompagnées de texte ou commentaire portant atteinte à ces mêmes droits s'y ajoutant éventuellement d'autres délits tels que l'  " atteinte à l’honorabilité " de la personne captée, ou des propos potentiellement discriminants ?

Nous l' avions évoqué dans un précédent article sur le droit à l'image en conseil Municipal [4]. Il apporte également un certains nombre d'éclairages sur ces deux notions, et en particulier le statut particulier des élus.

En effet, la législation reconnaît un droit inaliénable : Chacun dispose de ses droits entiers sur l'utilisation de son image. Donc, la règle générale protège l'individu. 

Toutefois il existe des exceptions.

La photo d'illustration suivante en est un exemple.

Image d'illustration Un électeur votant au 1er tour des Primaires Citoyennes à Noisy-le-Sec, 9 octobre 2011

© M. Nicolau / JENB Productions



Liberté de la presse et des médias en période électorale

La première est la liberté de la presse dont vous retrouverez un document riche d'informations à caractères internationaux, Européens et Constitutionnels.[5]

En France, c'est la loi du 29 juillet 1881 qui régit la presse [6] . Deux types de délits y sont essentiellement traités, souvent en référé : le délit de " Diffamation " et le délit d' " Injure ", généralement " publiques " puisque diffusées par des médias.

A noter que les blogueurs-citoyens, individuels, associatifs, ou non institutionnels, sont considérés comme des médias institutionnels  sur le plan judiciaire. Ils sont à la fois Auteur ET éditeur de leur publicationLes affaires d'un blogueur Noiséen, mais aussi de conflits dans d'autres communes entre blogueur-citoyen et élu [7] ces dernières années l'ont bien prouvé, même si les peines requises à titre individuel restent sans commune mesure avec les condamnations à l'encontre des médias " people " professionnels ; Elles n'en restent pas moins lourdes pour un citoyen lambda, tant en amendes qu'en dommages-intérêts, le plaignant se portant généralement partie civile. Les attendus de ces jugements en 1ères instances et en Appels sont explicites : Un blogeur-citoyen a les mêmes devoirs qu'un journaliste titulaire d'une carte professionnelle. Et comme notre Constitution est bien faite, un Devoir est compensé par un Droit. Le Devoir de respecter la déontologie des journalistes professionnels, implique un Droit à recueillir de l'information et la publier sous notre responsabilité respective. (Voir Code des Collectivités Territoriales  dans les hyperliens cités dans l'article référencé [4]).


Les élus

Les élus ont un statut particulier. Ils ne peuvent s'opposer à l'utilisation de leur image lorsqu'ils exercent dans le cadre de leur vie politique publique. Prenons l'exemple de notre Maire pour rester dans la proximité : En tant que reporter d'images, je peux capter son image lorsqu'il est dans le cadre de son mandat : Un conseil Municipal, une cérémonie officielle, une allocution lors d'un évènementiel public,... Et je peux diffuser ces images sur internet dès lors " qu'elles présentent un caractère historique ou informatif lié à l'évènement ". En conséquence, c'est essentiellement le texte (ou commentaire en vidéo) qui accompagne l'image qui peut être attaqué : Y-a-t-il un caractère discriminant, insultant, diffamatoire, ou outrageant dans l'utilisation de l'image captée et diffusée ? 

A ne pas confondre bien-sûr avec la publication factuelle, l'analyse politique argumentée, ou l'article d'opinion, même contradictoire, qui peut y être associé, qui lui est autorisé, dès lors qu'il ne présente pas les délits précédemment cités. Voilà pour ce qui concerne la partie " publique " de l'élu en général.  En revanche, je ne peux le filmer dans un cadre privé (sauf accord, bien-sûr)  : Cérémonie privée, acte de la vie quotidienne privée,... 

La photo ci-dessous en est un exemple. Elle y représente des élus dans le cadre d'une cérémonie officielle publique donc on peut illustrer un paragraphe concernant les élus. L'image est en rapport avec ce paragraphe. De plus l'image présente un caractère historique de notre commune. Enfin les Portes-drapeaux sont présents dans le cadre de leur vie publique. L'illustration et sa diffusion sont donc licites.

 Image d'illustration : Des élus lors de la cérémonie du 11 novembre 2008 à Noisy-le-Sec

© Archives JENB Productions

Le lieu 

Le caractère du lieu a toute son importance. En effet, si la voie publique est par définition "publique ", il en est autrement des bâtiments y compris publics. En d'autres termes, le caractère public d'un bâtiment n'implique pas obligatoirement le caractère public de la chose captée. 

Prenons l'exemple d'une mairie. Par définition c'est un lieu public, s'en est même le symbole. Mais le personnel qui y travaille se trouve, lui, dans le cadre de son exercice professionnel, donc de sa " vie privée ". De même, si par définition un mariage est public (les portes de la mairie doivent rester ouvertes et tout un chacun peut y assister), les époux, eux, sont présents dans le cadre de leur  " vie privée ", voire-même de leur " intimité ". L'exemple le plus récent est le mariage d'un élu [8], dont nous avons eu l'autorisation de filmer, mais dont la version internet (publique) ne comprend, avec l'accord des époux, que des extraits de la cérémonie civile.


Caractère public d'un bureau de vote


Primaire socialiste à Noisy-le-Sec : La soirée électorale du 1er tour [EXCLU]

Un bureau de vote est, tout comme un conseil municipal, un lieu " public ". Il se déroule dans un bâtiment " public " (généralement la mairie, les écoles,..) dans le cadre d'un évènement "Constitutionnel " donc " notoirement public ".

 Les personnes qui participent à l'organisation et au bon déroulement du scrutin ont un statut à part : La première est qu'ils sont eux-mêmes désignés par des délégués représentant chaque candidat : Ils agissent donc à la demande d'une " personnalité publique " (le candidat à l'élection) pour le représenter dans un " lieu public " lors d'un " évènementpublic ". Dès lors, ces personnes voient leur droit à l'image individuel s'en trouver restreint de par la Loi : Il ne peuvent s'opposer à une prise de vue que s'il y a " injure " et ou " Diffamation". Or, par définition, ces délits ne pourront éventuellement être constatés qu’ après diffusion. Pas avant.

 De plus, dans une élection normale, le Président du Bureau de vote est forcément un élu du Conseil Municipal. Par exemple à Noisy-le-Sec nous avons 19 bureaux de votes qui ont donc pour présidents respectifs les 19 premiers élus (dans l'ordre de la liste) du Conseil Municipal. C'est donc une personnalité publique agissant en tant qu' " élu dans le cadre de son mandat électif ".

De plus, le Président du bureau de vote est, de part le Code Électoral, garant le la Police du Bureau : Veiller au bon déroulement du scrutin, équité entre les candidats, arbitrer un conflit sur la base du Code Electoral mis à disposition de chaque bureau, veiller à l'ordre public et plus généralement à la bonne sérénité des votes. C'est souvent cet argument de " trouble à l'ordre public ", comme en Conseil Municipal d'ailleurs, que se retranchent certains pour interdire les captations. C'est bien-sûr un " abus de pouvoir " caractérisé, délictuel, et auquel la personne se voyant notifier un tel refus peut recourir à la Police pour faire constater et cesser cet abus. Une plainte peut être déposée en ce sens.

Il en est de même pour les assesseurs et les scrutateurs (dépouillement).

Un bureau de vote et les personnes qui en assurent le bon fonctionnement peuvent donc être photographiés ou filmés sous les réserves précédemment citées. De surcroît un site électoral est par définition un lieu où la transparence et la publicité des opérations sont requises.


Et les primaires ?

Les Primaires sont une première en France, du moins sous la 5ème République. N'étant pas prévue dans la constitution  (comme l'est une municipale, une présidentielle, législative, ...), elle est régie par une " Haute Autorité ". Toutefois, et c'est important, son électorat ne s'appuie pas sur des listes privées d’adhérents, mais sur les listes électorales officielles tenues par l'état-civil, qui est un document " public " et toutes les électeurs régulièrement inscrits peuvent y participer. Donc les bureaux de votes des Primaires Citoyennes sont dans lieux publics, tenus par des personnalités publiques. Juridiquement ils sont soumis à la même législation qu'un vote traditionnel.

En conséquence de quoi, aucun texte de loi ne vous interdit de prendre des images dudit bureau de votes et des personnes qui participent à son bon déroulement.

Cas particuliers des électeurs

Les électeurs participent certes à un évènement public, mais le fait de remplir son devoir civique relève sur la vie privée. En conséquence, tout comme en conseil municipal, vous ne pouvez pas capter l'image d'un électeur isolé sans son accord ou à défaut sous un angle de prise de vue qui ne montre pas son visage ou un signe particulièrement distinctif. En revanche un plan large ou apparaît au loin un assesseur (cas d'une photographie d'un élu en gros plan avec en fond des personnes du bureau). Cela semble peu recevable en justice car il n'y a pas d'irrespect de la vie privée, pas d'atteinte à l'intimité, ni d’intention de nuire.

N'oublions pas non plus que certains sympathisants aiment à être photographiés aux cotés des élus ou lors d'interview (Cas habituel d'interview vidéos où des membres de la foule arrière font tout pour être remarqués).

Mais bon, par prudence, mieux vaut éviter l'électeur, à moins qu'il ne donne sans équivoque son accord. 

Diffusion publique des images : Moment de prudence et réflexion

La publication, sur internet pour nous blogueur, est le moment délicat. Après s'être assuré que les images captées sont conformes aux principes législatifs précédemment exposés, l'auteur doit prêter une attention toute particulière lors de la publication : L'image utilisée en tant qu'illustration doit être en rapport avec le sujet traité et donc que les images revêtent un caractère " illustratif significatif " ou un caractère " historique " . Le texte ou commentaire doit donc être lié à cette actualité ou cette thématique. Car le sujet capté peut faire valoir ses droits moraux. L'auteur doit donc veiller à ce que son ou ses images aient un lien direct avec l'évènement ou le thème de l'article sans présenter une " atteinte à l'honneur " de la personne captée.


Politesse et courtoisie évitent les conflits

Bien que le Droit donne raison à la captation d'un tel évènement, le meilleur moyen que tout se passe bien consiste tout simplement à se présenter au Président du bureau de vote et de manifester votre souhait à capter certaines images. Choisir ou attendre de préférence un moment de calme (peu d'électeurs) pour solliciter et réaliser vos captations. Et ce afin de ne pas perturber la nécessaire sérinité des opérations de vote.

Par courtoisie l'idéal est malgré tout de solliciter les personnes concernées. Certains peuvent avoir une raison objectivement recevable à ne pas vouloir être filmés et généralement un signe de la main suffit pour que le photographe change d'angle.

En règle générale, ces simples formules de politesse réussissent à éviter des conflits qu'il n' y a pas lieu d'être.


Dimanche, vous pouvez prendre des images : On vous le demande !

C'est non seulement votre droit, mais en plus souhaité par les organisateurs du scrutin ! En effet un mail de la coopol précise même : «(...)  Nous avons besoin de vous pour suivre et commenter en direct le scrutin sur la page live du site des primaires tout au long du week-end ! http://www.lesprimairescitoyennes.fr Trouvez votre bureau de vote surhttp://www.lesprimairescitoyennes.fr N'hésitez pas non plus à nous envoyer toutes vos photos et vidéos d'ambiance dans les bureaux de vote des primaires pendant tout le week-end :http://www.lesprimairescitoyennes.fr/article/primaires-citoyennes-envoyez-nous-vos-photos-et-videos (...) ».


Bon week-end.

Jean-Emmanuel Nicolau-Bergeret

© 14 octobre 2011 - JENB PRODUCTIONS (Noisy-le-Sec)

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Références

JENB Productions ; JENB Productions sur Dailymotion


[1] L'objet de ce billet ayant surtout une valeur pédagogique, le masculin est valable dans tout le texte y compris pour les femmes. De même seront tus les noms des protagonistes. Nous évoquerons ce fait-divers dans un billet ultérieur.

[2] Source : Légifrance.fr
[3] Source : Blog de Maître Fitoussi
[4] Source : « Oui, on peut filmer un conseil municipal ! C'est un droit à condition d'en faire bon usage », JENB productions, 27 juin 2011
[5] Source : « Médias et élections », The Electoral Knowledg Network (en version française)
[6] Source : « Délits de Presse en matière électorale », Jurispédia, consolidé au 12 juin 2009 ;
[7] Source : Rubrique « Justice », JENB Productions 2008, 2009, 2010 ;
[8] Source : « Mariage V.I.P. à Noisy-le-Sec : Un élu inaugure la nouvelle charte des mariages » ; JENB productions, 5 octobre 2011
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Commentaires
M
Très bon article qui fait suite à celui sur le même sujet que vous avez déjà publié, cela n'est jamais inutile de rappeler les droits et devoirs.
R
Précision de l'Auteur :<br /> <br /> Pour ce qui concerne les délits commis sur internet, le plaignant peut saisir toute juridiction compétente sur l'ensemble du territoire français.
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