Tramway T1 à Noisy-le-Sec : Un projet dévastateur
Destruction programmée d'une ville
Par
Jean-Emmanuel Nicolau-Bergeret
Contrairement aux prévisions météo, l'été s'annonce caniculaire à Noisy-le-Sec.
En cause, le projet de prolongement du tramway T1 vers l'est et particulièrement la traversée de Noisy-le-Sec (Seine-Saint-Denis). En préambule, doit-on parler encore de « prolongation » alors-même que le programme prévoie une rupture de charge à Bobigny, ville-préfecture qui, de fait, deviendra le terminus ouest du tronçon de cette sorte de « T1bis » ? D'autant que l'actuel tronçon entre Bobigny et Noisy-le-Sec, long de 3 km devra être entièrement requalifié pour accepter le nouveau matériel roulant [ NDLA : Les riverains du Petit-Noisy, déjà traumatisés par le chantier de 2003, apprécieront le retour des engins de travaux]. Si on y ajoute les 7,7 nouveaux kilomètres de Noisy-le-Sec à Val-de-Fontenay, il serait plus juste d'évoquer une « création » de ligne plus qu'une « extension ».
Une projet dévastateur
L'association « Tramnon », qui organisait une réunion publique d'information mardi dernier, a réussi son challenge puisque la salle Carnot était pleine. Plus de 200 personnes (Photo ci-contre) ont ainsi écouté avec attention les exposés très détaillés des intervenants. La précision des argumentaires témoignent de la rigueur et du sérieux de l'association organisatrice de l'assemblée.
Des informations qui inquiètent légitimement les Noiséens tellement le projet, porté par le Stif et le Conseil général de Seine-Saint-Denis, s'annonce destructeur !
Car le passage en double sens du tramway T1 et des véhicules par la rue Jean-Jaurès, solution retenue par ces instances politiques respectivement présidées par les socialistes Jean-Paul Huchon et Stéphane Troussel, est un dessein ubuesque à bien des égards :
- La configuration topologique de l'axe Jean-Jaurès va rendre très compliqué la circulation du tramway lui-même puisqu'il ne sera pas en site dédié ; cette absence de site dédié a par ailleurs son importance pour l'alimentation électrique, j'y reviendrai dans la seconde partie.
- Le shéma directeur de la circulation automobile va profondément être modifié sur l'ensemble du coeur de ville, d'autant qu'un muret central est prévu sur une partie du tronçon Jaurès ; Les reports de trafic automobile sur les secteurs adjacents seront importants.
- La présence des voies de tramway entraînera une diminution substantielle des places de stationnement, non seulement sur l'axe Jaurès, mais aussi sur les rues adjacentes, dont le Boulevard Michelet mis à double sens ;
- La surface occupée par l'infrastructure des voies diminuera d'autant les espaces pour les autres usagers dont les piétons, fort nombreux à proximité des quelques 150 commerces directement concernés et les nombreux établissements scolaires. La largeur des trottoirs sera réduite, en de nombreux points, à 1m40 ; La plupart des étals et terrasses des commerces seront supprimés (Voir photos ci-dessous, cliquez sur les images pour agrandir) ;
- Les difficultés de circulation et de stationnement dégraderont de manière irréversible l'activité économique locale tant en matière de livraisons des marchandises (places livraisons supprimées sur l'axe Jaurès) que d'accessibilité de la clientèle. A terme, c'est l'existence et la survie des commerces de proximité qui sont menacées ;
- L'incompatibilité évidente entre la circulation des tramways et le fonctionnement tri-hebdomadaire du marché aux comestibles, en particulier les périodes de montages et démontages. Le tramway rue Jean-Jaurès entraînera de facto la disparition du marché.
C'est donc tout le tissu économique local qui sera irréversiblement dégradé, avec les conséquences sociales induites : Il est vrai que, dans la période faste que nous traversons, on peut se permettre de détruire de l'emploi de proximité !
La sécurité incendie menacée
Au delà de la condition d'insécurité induite par la mixité des véhicules et des piétons sur une surface aussi étroite, c'est sur un aspect de sécurité civile que le passage par l'axe Jaurès pose une interrogation majeure aujourd'hui sans réponse : en cas d'incendie dans l'une des habitations de cette rue, entre la gare et la Place des découvertes, comment la Brigade des Sapeurs-Pompiers de Paris va-t-elle pouvoir déployer ces engins échelles et bras articulés pour les sauvetages aériens en présence de la ligne caténaire ? La responsabilité pénale de certains élus actuels pourraient bien être engagées en cas de sinistre ultérieur !
Le projet est en effet en totale contradiction avec les préconisations portées par le STRMTG (Service Technique des Remontées Mécaniques et des Transports Guidés) dans son « Guide accessibilité des secours sur les sites tramways » en 2007.
On peut d'ailleurs y lire : « Tout nouveau système de transport public guidé, ou toute modification d’un système existant, est conçu et réalisé de telle sorte que le niveau global de sécurité à l’égard des usagers, des personnels d’exploitation et des tiers soit au moins équivalent au niveau de sécurité existant ou à celui des systèmes existants assurant des services comparables ».
La prise en compte du niveau de sécurité des riverains est donc implicite. »
Or, sauf à utiliser des tramways diesel, il faut alimenter le tramway en électricité (750v). Il n'y a que trois possibilités :
- La ligne aérienne de contact (LAC également appelée caténaire) ;
- Ligne d'alimentation par rail au sol ;
- Batterie.
La LAC est le moyen habituel utilisé, mais les porteurs de projets préfèrent parfois la remplacer par un 3è rail au sol pour des raisons d'esthétique ou dans des situations d'urbanisme très contraintes, comme c'est le cas pour cette portion. La réglementation est très stricte dans ce cas pour d'évidentes raisons de sécurité. Selon les orateurs lors de la réunion, « elle nécessite, [entre autres], un site propre au tramway ». Ce n'est pas le cas pour cette longue portion entre la gare et la Place des Découvertes. « La réglementation interdit l'alimentation par le sol rue Jean-Jaurès » Par ailleurs ce procédé est, toujours d'après les exposés, sensibles aux intempéries pluviales et induit des coût supplémentaires .
Quant aux batteries embarquées, la technologie actuelle est, selon Tramnon, « incompatible » avec le projet, la section concernée étant trop longue. Cette solution présente également un surcoût non négligeable selon les orateurs.
De fait, la LAC semble rester le seul moyen d'alimentation qui présente toutefois trois risques pour la progression des secours et le déploiement des échelles de secours :
- Le danger électrique (photo ci-contre extraite du dossier STRMTG précité) : Il nécessite une coupure d'urgence de l'alimentation selon des protocoles assez lourds entre l'organisme de secours et l'exploitant, voire parfois trop longues selon les degrés d'urgence. Le STRMTG précise : « La procédure de coupure d'urgence (CU) de l'alimentation électrique peut s'effectuer sur demande des intervenants, relayée par (...) CCOT pour la BSPP (...) . La coupure effective étant effectuée par l'exploitant depuis son (ses) poste(s) de commande (PC) par action sur un bouton poussoir de type « coup de poing » condamnable. Selon les réseaux, cette commande a généralement pour effet d'activer l'ouverture des disjoncteurs de voie (DV) situés entre les postes de redressement et la LAC. Cette procédure doit être possible 24 heures sur 24, ce qui suppose la mise en place d’une permanence de l’exploitant. (...) Toutefois, il convient d’indiquer que les délais de mise en oeuvre par le personnel de l’exploitant seront généralement incompatibles avec une intervention d'urgence. » ;
- Le dégagement des rames : car qui dit coupure de courant implique l'immobilisation du trafic tramway. Les rames immobilisées en urgence peuvent donc être source d'obstacles à la bonne progression des secours.
- L'obstacle physique : même l'alimentation coupée, la LAC demeure un obstacle physique à la mise en station, au déploiement et à la giration des échelles et bras articulés aériens des sapeurs-pompiers.
Au delà des considérations environnementales, sociales et économiques, l'accessibilité des secours d'urgence est sans aucun doute l'inquiétude majeure de ce projet. Selon Tramnon, cet aspect primordial n'a pas de réponse satisfaisante à ce jour.
Enquête publique
L'enquête publique est lancée. Les Noiséens doivent fortement se mobiliser pour prendre connaissance du dossier et surtout apporter leurs observations. La période estivale ne doit pas être source de dispersion mais au contraire de mobilisation. Retrouvez toutes les dates et lieux en cliquant ici.
Une enquête qui devrait mobiliser bien au-delà de Noisy. Les automobilistes franciliens apprendront, par exemple, que l'autoroute A3 nécessitera de nombreuses fermetures pendant des périodes indéterminées, pour la création de l'ouvrage d'art qui prévoit l'évacuation de 48 000 tonnes de béton. Les habitants des villes voisines auraient bien tord d'imaginer que ce projet n'est qu'un problème Noiso-Noiséen ! Ne serait-ce qu'en terme de coût et donc d’impôts locaux futurs ...
Nous reviendrons plus en détail sur ce projet dans de prochains articles.
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